Et si communiquer moins permettait d’avoir plus d’impact ?
Posts, newsletters, articles, vidéos, stories… Les contenus se multiplient à un rythme effréné. Résultat : saturation des publics, pression accrue sur les équipes marketingcommunication, et une empreinte environnementale numérique largement sousestimée.
Face à cette infobésité, une approche émerge et gagne du terrain : la sobriété éditoriale. Non pas arrêter de communiquer, mais communiquer mieux. Moins de bruit, plus de sens. Moins de contenus inutiles, plus d’utilité.
Dans cet article, inspiré de l’échange avec Ferréole Lespinasse, on explore :
- ce qu’est réellement la sobriété éditoriale,
- pourquoi elle devient un enjeu stratégique pour les marques,
- comment intégrer le cycle de vie des contenus,
- le rôle clé du langage clair,
- et des pistes concrètes pour passer à l’action.
Contenu issu de l’épisode n°50 du podcast Markoeur, avec Ferréole Lespinasse, consultante et autrice du guide « Sobriété éditoriale – le guide pour écoconcevoir vos contenus ».
I. Sobriété éditoriale : de quoi parleton vraiment ?
-1. Une approche née de l’écologie éditoriale
Avant même de parler de sobriété numérique, Ferréole Lespinasse travaillait dès 2015 sur ce qu’elle appelait l’écologie éditoriale : une idée simple mais radicale : si on n’a rien d’utile à dire, mieux vaut ne rien dire.
Avec l’essor du numérique responsable, cette réflexion s’est structurée pour devenir la sobriété éditoriale : une démarche qui interroge la pertinence, l’utilité et l’impact des contenus, qu’ils soient digitaux ou print.
-2. Réduire l’impact… sans sacrifier la performance
La sobriété éditoriale vise plusieurs objectifs :
- réduire l’empreinte environnementale de la communication,
- préserver la charge mentale des publics,
- soulager les équipes communication,
- améliorer la cohérence et l’efficacité des messages.
Autrement dit : moins de contenus, mais des contenus qui comptent.
II. Infobésité : quand trop communiquer rend invisible
-1. Des chiffres qui interrogent
Quelques données clés évoquées dans l’épisode :
- 26 % des actifs se disent submergés par l’information (Fondation JeanJaurès, 2024),
- 54 % des Français déclarent une surcharge informationnelle,
- 70 % finissent par limiter ou arrêter de consulter les informations,
- 96,5 % des pages web n’ont aucun trafic.
Ces chiffres révèlent une réalité dérangeante : une grande partie des contenus produits n’est ni lue, ni utile, tout en consommant des ressources.
-2. La face cachée de la pollution numérique
Contrairement au print, le numérique donne l’illusion de l’immatérialité. Pourtant, chaque contenu stocké mobilise des serveurs, de l’énergie, des infrastructures.
Pages événementielles oubliées, articles obsolètes, newsletters jamais ouvertes… le web se transforme en cimetière numérique, faute de nettoyage éditorial.
III. Penser le cycle de vie d’un contenu
-1. Du produit au contenu : même logique
Les équipes marketing sont désormais familières du cycle de vie des produits. Mais cette logique est encore rarement appliquée aux contenus.
La sobriété éditoriale propose de réfléchir, dès la création, à :
- la durée de vie du contenu,
- sa mise à jour,
- son éventuel recyclage,
- son archivage ou sa suppression.
-2. Entretenir son patrimoine éditorial
Un contenu n’est pas figé. Il vit, évolue… ou devient inutile.
Bonnes pratiques clés :
- mettre à jour régulièrement les contenus existants,
- supprimer ceux qui n’ont plus de valeur,
- rediriger intelligemment les pages obsolètes,
- éviter l’accumulation de pages sans usage.
👉 Résultat : un site plus lisible, plus performant, et souvent meilleur pour le SEO.
IV. Le langage clair : pilier de la sobriété éditoriale
-1. Une norme ISO au service de la compréhension
Le langage clair est désormais encadré par la norme ISO 24495. Son objectif : permettre au lecteur de trouver, comprendre et utiliser l’information facilement.
Contrairement aux idées reçues, simplifier ne veut pas dire appauvrir. Il s’agit de :
- phrases plus courtes,
- structure logique,
- vocabulaire précis,
- hiérarchisation de l’information.
2. Langage clair vs FALC : ne pas confondre
- Langage clair : pour tous les publics, y compris experts.
- FALC (Facile à lire et à comprendre) : destiné aux personnes ayant des difficultés cognitives.
Les deux approches sont complémentaires, mais répondent à des usages différents.
V. Les 4 piliers de la méthodologie de sobriété éditoriale
1. Authenticité
Être sincère, transparent, aligné avec sa mission, sa vision et ses valeurs. La communication devient un acte de mise en commun, pas d’autopromotion.
2. Utilité
Se poser la question clé : estce utile pour mon public ?… et pour mes objectifs.
3. Clarté
Appliquer les principes du langage clair pour faciliter la compréhension et l’action.
4. Écoconception des contenus
Dimensionner les supports au juste besoin :
- moins de formats,
- moins de fréquence,
- plus de qualité.
VI. Réseaux sociaux, IA, KPI : changer de regard
-1. Publier moins, publier mieux
Les algorithmes évoluent. La quantité n’est plus garante de visibilité. La qualité et la pertinence reprennent leur place.
La sobriété éditoriale invite à :
- questionner la présence sur chaque plateforme,
- ajuster les fréquences,
- assumer des choix éditoriaux cohérents.
-2. Repenser les indicateurs de performance
Sortir des KPI purement quantitatifs (nombre de posts, likes) pour intégrer :
- mise à jour des contenus,
- taux d’utilité réelle,
- suppressions assumées,
- clarté et efficacité des parcours.
Conclusion – Communiquer responsable, c’est aussi faire sa part
La sobriété éditoriale n’est ni une contrainte ni une mode. C’est une réponse pragmatique aux enjeux environnementaux, sociaux et humains de la communication contemporaine.
Communiquer reste indispensable. Mais mieux communiquer devient une responsabilité.
Ralentir, clarifier, trier, supprimer parfois… pour redonner de la valeur à la parole des marques.
👉 Parce que la qualité des contenus est aussi un marqueur de la bonne santé des entreprises.
Retrouvez les ressources proposées par Ferréole sur les méthodologies d’une sobriété éditoriale.
Retrouvez d’autres épisodes du podcast Markoeur autour de la communication responsable :
- N°9 – Assaël Adary : Mesurer pour mieux piloter marketing et communication
- N°20 – Thomas Parouty : Communiquer responsable sans perdre en impact
- N°22 – Storytelling durable : Récits responsables au service des marques
- N°23 – Nouveaux récits : Déconsommation et sobriété numérique concrète
- N°40 – Mathieu Jahnich : Éviter le greenwashing durablement
- N°41 – Delphine Margot : Relations presse responsables et impactantes
- N°44 – Cyndie Bettant : Lutter contre la désinformation des marques
- N°52 – Férréole Lespinasse : Moins communiquer pour plus d’impact

